Nous observons tout d’abord un contraste fort entre ce qui nous découvrons dans le projet de décret relatif à l’organisation académique et ce qui nous avait été présenté lors des discussions de l’agenda social. La portée de ce décret sur le système éducatif est telle que nous constatons avoir été floués. Plusieurs réunions organisées dans le cadre de l’agenda social du Ministère de l’Éducation nationale réunissaient en effet depuis la rentrée 2010 les syndicats compétents pour les IEN. Si l’ambiance n’y était pas désagréable, la vacuité de leurs objectifs dominait et aucune des propositions formulées par les syndicats n’a trouvé le moindre commencement de traduction concrète. La rencontre du 29/06/11 a pris un nouveau tour : nous avions en effet eu connaissance du projet de décret redéfinissant l’organisation de la gouvernance du men.
Ce projet de décret s’inscrit dans le contexte de « rupture » que nous connaissons depuis le début du quinquennat qui veut subordonner la politique éducative de l’État à la réduction de la dépense publique. La RGPP, la LOLF et le NMP [1] sont désormais les matrices de toutes propositions de « réformes ». Les objectifs qui sont atteindre ne sont pas tant des objectifs pédagogiques que des objectifs budgétaires. C’est bien dans ce sens que sont articulées les politiques publiques, et ce décret marque sans aucun doute un renforcement des prérogatives administratives et gestionnaires au détriment des prérogatives pédagogiques et disciplinaires.
Ce projet acte donc :
- d’abord, un renforcement du lien de subordination entre le pouvoir politique et l’administration de l’Éducation nationale. On le voit dans l’affirmation du pouvoir des recteurs sur l’ensemble du territoire académique. Rappelons qu’ils sont nommés par le président de la République en conseil des ministres.
- ensuite, un renforcement du lien de subordination de la politique éducative aux politiques économiques et budgétaires. Le changement d’appellation des IA-DSDEN en « directeur académique » pourra apparaître anodin à beaucoup. Pourtant, il s’agit d’ouvrir la possibilité de déconnecter l’accès à cet emploi du corps des IA-IPR. Aux cadres territoriaux issus des corps d’inspection, se substitueront à l’avenir des cadres issus des corps administratifs, voire de la société civile. C’est une part de la spécificité de l’administration de l’éducation nationale qui est appelée à disparaître.
Jusqu’à maintenant, l’administration du système éducatif public de notre république se caractérisait par un statut particulier : il était géré par des membres de l’enseignement, universitaires et inspecteurs pédagogiques. À l’évidence, cette spécificité est désormais niée par le pouvoir politique en place qui veut lui imposer des normes déconnectées de son objet particulier. Avec la réforme engagée, recteurs et directeurs académiques s’inscrivent dans une dépendance renforcée du pouvoir politique.
C’est un choix idéologique fort qui interpelle tout le projet sociétal de la nation. Bouleverser ce projet par décrets n’est pas à la hauteur de l’enjeu, un enjeu qui dépasse de loin la seule dimension réglementaire.
Le SNPI-FSU ne peut à l’évidence pas considérer cette réforme majeure comme un banal aménagement réglementaire. Son impact sur le système éducatif national, comme sur la vie professionnelle des inspecteurs, devrait s’avérer considérable.
La méthode de dialogue social utilisée par le ministère pour cette réforme est stupéfiante. Une simple annonce à l’improviste, suivie d’une réunion de présentation inopinée dans la dernière semaine de l’année scolaire, ne peut suffire.
C’est là un déni qui présage de sombres desseins quant aux finalités de la réforme engagée. Nous ne pouvons accepter cela et exigeons l’ouverture d’un chantier de travail à la hauteur des enjeux.
Le bureau du SNPI-FSU